Dans les coulisses d'une classe inversée
Episode 11 - Un tétra-aide bien utile

Suite à l'épisode 10 publié précédemment, plusieurs enseignants m'ont contactée : les uns pour des encouragements sympathiques et rassurants, d'autres pour des échanges riches avec des questions croustillantes et des astuces et conseils précieux. Merci à ceux qui ont pris le temps de me lire et d'échanger sur le dernier épisode, notamment Florence Raffin pour son tuyau qui fait l'objet de ce nouvel épisode.


Aïe aïe aïe mes oreilles !

Avant de me lancer dans la classe inversée, mes élèves étaient habitués à faire des travaux de groupes, ponctuellement. En changeant mon approche en mars dernier, l'occasionnel est devenu quasiment systématique : à tous les cours, même s'ils ne sont pas toujours en activité de groupe, les élèves travaillent dans une disposition de salle en îlots. De ce fait, les échanges sont bien plus nombreux qu'avant et le volume sonore est très nettement monté d'un cran... mais comment ne pas supporter que des élèves parlent maths ? car oui, ils ne bavardent pas, ils papotent du/sur/à propos/autour du cours. Pleinement engagés dans leurs travaux, ils ne prennent pas la mesure de ce bruit de travail, mais moi si ! Et c'est épuisant d'autant que ma salle n'a pas de faux plafond et ça résonne ! C'est surtout "la" grande difficulté que je rencontre et que je ne parviens pas à améliorer !


Un peu de travaux manuels

En lisant mon article précédent, Florence Raffin1, formatrice et professeure de sciences physiques dans un lycée de la Nouvelle Aquitaine m'a sauvée. Spontanément, Florence m'a glissé la solution ! 

Grosso modo, pour réduire le bruit, il faut du papier, des ciseaux, de la colle, une imprimante couleur, une bonne séance de travaux manuels et c'est joué ! Ah bon ?

Comme je n'ai pas d'autres solutions, je suis ce conseil de l'experte de la classe inversée. On verra bien ! En avant, papier, ciseaux...


Retour en classe

Et puis, quand il faut y aller, faut y aller ! Ce matin, deux classes de 4e (30 élèves chacune) ont pu expérimenter ce petit objet coloré.

Avant de leur présenter, petit échauffement des cordes vocales. En effet, Florence Raffin m'a offert un deuxième conseil pour enseigner le chuchotement aux élèves. Il s'agit de mettre la main sur la gorge. Tout d'abord, on demande aux élèves de parler à voix normale (par exemple et au hasard, dire pendant 10 seconces : "j'adore les mathématiques"). Ils constatent tous, les  vibrations. Puis, on recommence le même exercice, la main toujours sur la gorge, les répétitions de la même phrase mais cette fois en chuchotant. Et là, ça ne vibre plus !

Maintenant qu'ils ont saisi comment faire la différence entre parler à voix normale et chuchoter place à la description du nouvel outil avec au passage quelques rappels de géométrie dans l'espace. Chaque couleur doit donner une information au professeur :

  • VERT : tout va bien ! on s'entraide.
  • BLEU : on a une question, mais elle n'est pas urgente.
  • ROUGE : SOS ! On est bloqué, malgré l'entraide, on a besoin du professeur.
  • JAUNE : le bruit des autres groupes nous dérange.Même si elle est assez intuitive, l'utilisation du tétra-aide est expliquée aux élèves. Puis, c'est parti !

MA-GI-QUE

Les effets sont immédiats dans les deux classes. 

Le niveau sonore s'est très distinctement amélioré. L'ambiance est nettement plus calme sans que les échanges entre les élèves n'aient diminué. Dès que j'entendais le son monté ou qu'un groupe pointait son tétra-aide sur le jaune ; je redemandai aux élèves de remettre la main sur la gorge. C'était très efficace au point où je n'ai guère du le répéter plus de deux fois.

Le deuxième effet que je n'attendais pas forcément a été dans la gestion des îlots. En un coup d'oeil, je savais quel groupe avait besoin de moi, de manière urgente ou non. Et les élèves le voyaient également, du coup, ils se montraient plus patients et m'appelaient finalement moins que d'habitude.  Dans les dix dernières minutes des deux cours, toutes les pyramides pointaient sur le vert. Tous les groupes ont fini le cours en complète autonomie et dans un calme appréciable, alors que jusqu'à présent, je n'avais jamais arrêté de passer d'un groupe à l'autre jusqu'à la dernière minute, sans avoir la sensation d'avoir vu tout le monde. Ici, cet outil, petit mais costaud, a permis de hiérarchiser l'aide que je pouvais apporter aux uns et aux autres et d'inciter les élèves à développer leur autonomie.

Florence m'avait dit : "tu verras, l'essayer, c'est l'adopter !". Et bien je confirme et les élèves aussi !

Reste à voir maintenant si cette petite nouveauté ne s'essouflera pas dans le temps et que nous, tant les élèves que moi, continuerons à l'utiliser avec la même efficacité.


Rendons à Bruce ce qui appartient à Bruce

Grâce à Twitter et aux échanges de professeurs inverseurs à propos du tétra-aide, nous avons retrouvé la source de la source !

L'auteur de cette création magique est Bruce Demaugé-Bost. Bruce est enseignant d'une des classes de CE2-CM1-CM2 d'une école de Vaulx-en-Velin. Si vous ne le connaissez pas, allez jeter un coup d'oeil sur son site sous forme d'abécédaire de pépites pédagogiques. Pour retrouver son travail sur le tétra-aide rendez-vous à la lettre T sur son site : http://bdemauge.free.fr/

Merci à Bruce Demaugé-Bost et à Florence Raffin pour m'avoir aidée à surmonter une difficulté supplémentaire et de me permettre d'avancer encore un peu plus dans la classe inversée.


Quand les échanges se poursuivent...

Grâce aux échanges, voici deux ressources pour compléter le sujet :

Un tuto de Sébastien Franc sur le tétra-aide ! Merci Sébastien pour cette info.

- Un site internet classroomscreen pour réguler le bruit et pas que ! Merci à Romain Bourdel-Chapuzot pour l'info.


1 Site internet de Florence Raffin : https://sciencesgenevoix.jimdo.com/